Mohammad Bamm et sa poésie sont bien connus du public persanophone, notamment des adeptes du “ghazal postmoderne”. Il peut sembler étrange que son premier livre soit publié en version bilingue, avec une traduction française, à des milliers de kilomètres de son pays natal. La traduction de la poésie dans une autre langue, bien qu’elle puisse relier les deux cultures et attirer des publics du monde entier (surtout en français, qui possède une littérature riche et puissante), est souvent un exercice excessivement difficile. Si le poète, le traducteur et le texte ne sont pas en mesure d’établir les communications requises, en raison de la perte des capacités et des techniques linguistiques, de l’incapacité à transférer les références textuelles à des événements culturels et historiques, de la perte de la musique verbale, de la difficulté de compréhension par le lectorat en raison des différences culturelles, etc., le résultat ne sera pas aussi significatif et l’œuvre traduite ne pourra pas être pleinement accueillie par le public. Rappelons que le “Ghazal postmoderne” possède des formats rythmés et, qu’en persan il est difficile de respecter les rythmes et les rimes dans la traduction. D’autre part, les œuvres appartenant à ce courant de poésie sont truffées de jeux verbaux ainsi que de références indigènes et culturelles, généralement perdues lors de la traduction ou nécessitant de nombreuses notes de bas de page afin de transmettre tout leur potentiel.

Mehdi Mousavi

Poèmes traduits du persan par Behi Djanati Ataï

Co-production
Villa Bloch - Poitiers
Parution
16/05/2022
Collection
Hors Collection
Format
130 x 210
Français/Persan
Broché
12 photographies en noir et blanc
72 pages
ISBN : 978-2-35046-563-0
Commander

Mohammad Bamm Est né en janvier 1990 à Sarbandar, près du port de Mahshahr. Sa famille, qui avait été contrainte d’émigrer à cause de la guerre de huit ans, est rentrée au pays avant qu’il ait un an. Il a donc grandi à Abadan, bien qu’il n’ait jamais pu voir la prospérité d’avant-guerre dans la ville. Il a découvert la poésie en lui par accident alors qu’il étudiait à l’université et a été emprisonné pour une courte période quelques années plus tard parce qu’il écrivait des poèmes. Il a de nouveau été arrêté un an après sa libération sous caution alors qu’il attendait toujours son procès.

Les forces de sécurité l’ont enlevé dans la rue après la deuxième nuit des manifestations de 2017-2018. Cette fois, il est resté en prison pendant trois mois jusqu’à sa libération sous caution.
Il a passé un mois à l’isolement sous les interrogatoires et la torture. Pendant cette période, il a également perdu son emploi d’enseignant, il a donc décidé de quitter l’Iran contre son gré.

Nazanin Bamm – Eftekhari L’a accompagné dans ce voyage. Nazanin est née en mai 1993 à Abadan.
Elle a poursuivi ses études à Abadan et à Mashhad. Elle a commencé la photographie après la mort de son père, probablement en réaction à cette perte et de manière totalement intuitive. Elle a d’abord pris des photos de ses propres mise en scènes avec son téléphone portable.
Un jour, alors qu’elle se rendait dans un studio pour imprimer ses photographies, elle a reçu une offre d’emploi. Dès lors, elle a exercé son art de manière professionnelle tout en poursuivant ses études de photographie.

Alors que le couple se trouvait en Turquie, ils ont appris que le tribunal avait condamné Mohammad à la prison et à la flagellation. Il ne faisait dès lors aucun doute qu’ils devaient poursuivre leur voyage. Finalement, grâce au soutien du réseau ICORN, ils ont quitté la Turquie pour la France et ont été accueillis par la Ville de Poitiers.

Dans sa pièce, Hedâyat, Behi Djanati Ataï rend à la fois hommage au grand écrivain contemporain iranien Sadegh Hedâyat (1903-1951) et à son père qui écrivit sa première biographie. Au moment où son père écrit cette biographie, Behi Djanati Ataï s’implique dans le projet, participe à la frappe du manuscrit, lit des ouvrages de Hedâyat, même si elle se rend compte aujourd’hui qu’à l’époque elle ne pouvait saisir toutes les subtilités de ses livres. Cette biographie parue en 1978 et qui, en parallèle, traite également de l’histoire de l’Iran, est interdite peu après la révolution islamique. L’éditeur est alors emprisonné tandis que le père de Behi est inquiété. Behi et sa famille décident alors de quitter l’Iran. Après 6 mois passés aux États-Unis, ils rejoignent son père en France, ce dernier ayant été refoulé à l’arrivée aux États-Unis.
Écouter L’exil aux États-Unis & L’arrivée en France

Behi passe son bac à Paris, passe le concours de l’école de théâtre de la rue Blanche (Ensatt) où elle est admise, mais selon le souhait de sa mère, elle renonce à devenir comédienne dans l’immédiat et entame des études scientifiques. Après un cursus brillant, elle commence à suivre un atelier théâtre le soir puis passe une audition qui lui permet d’entrer dans une troupe. C’est ainsi qu’elle devient comédienne professionnelle. Elle joue dans plusieurs créations contemporaines, puis, en 1998, crée avec Thierry Le Goff une salle de spectacle sur la péniche La baleine blanche à Paris. Elle joue également dans des longs métrages (notamment Le vieux qui lisait des romans d’amour de Rolph de Heer avec Richard Dreyfus).

Behi se souvient avoir été marquée par l’injustice de la censure, par le fait que tous le travail effectué par son père soit, en quelque sorte, “jeté à la poubelle” avec l’œuvre d’Hedâyat. Elle a longtemps gardé en elle ce désir d’écrire une pièce à partir du livre de son père et de lui rendre à son tour hommage. Alors qu’elle avait écrit la pièce depuis quelques temps, elle se décide seulement à faire lire le texte après un voyage en Iran. Elle n’était pas retournée dans son pays depuis 22 ans, elle découvre que les livres d’Hedâyat y existent encore mais censurés et que différents ouvrages font référence à la biographie de son père, bien qu’elle soit toujours interdite. À son retour, elle réalise que l’année 2003 va correspondre au centième anniversaire de la naissance d’Hedâyat et au dixième anniversaire de la disparition de son père. Elle confie donc le texte au directeur du Revest, théâtre de Toulon, qu’elle connaît déjà en tant que comédienne. Ce dernier est conquis par le projet et son énergie, il lui offre donc une résidence de création.